Accueil MAURITANIE Indépendance de la Mauritanie : la douloureuse histoire du 28 novembre !

Indépendance de la Mauritanie : la douloureuse histoire du 28 novembre !

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Le 28 novembre n’est pas que synonyme de levée des couleurs en Mauritanie, mais aussi pour certains, un symbole de racisme et de barbarie. Le 28 novembre 1990, 28 militaires mauritaniens de la base d’Inal, dans la région de Nouadhibou précisément, sont pendus pour célébrer de façon macabre le trentième anniversaire de l’indépendance.

Le 28 novembre 2017, date de l’indépendance de la Mauritanie, célébré en grande pompe à Kaédi (sud du pays) a été émaillé de violence inouïe, enregistrant des arrestations de victimes et d’orphelins dont le seul tort aura été de dérouler une banderole demandant au chef de l’Etat le règlement définitif du passif humanitaire.
Difficile d’évoquer les festivités du 28 novembre 2017, jour de l’accession au pouvoir de la Mauritanie. Ce jour rappelle à toute une communauté du pays un moment de son histoire, où le système d’état à sa tête a tenté, littéralement d’oblitérer les forces vives, militaires et intellectuelles noires mauritaniennes.

Le 28 novembre 1990, 28 militaires, marins et policiers, tous noirs et pulaars, sont pendus à Inal près de Nouadhibou, après d’innommables séances de tortures et autres sévices inhumains.

La Mauritanie célèbre son indépendance, obtenue en 1960. Une date qui correspond à un autre anniversaire, plus douloureux : celui du massacre de 28 militaires à la base d’Inal, pendus parce que Noirs.
Le sujet reste tabou dans le pays et aucune excuse n’a jamais été présentée aux familles.

Ce 28 novembre 1990, la pendaison des 28 d’Inal a été minutieusement orchestrée et préparée. La veille, les prisonniers sont sélectionnés parmi tous ceux qui ont été arrêtés les semaines précédentes, et marqués d’une croix et d’un numéro allant de un à 28, comme de vulgaires sauvages. A minuit, les hommes sont conduits devant un hangar. La suite est odieuse : pendus un à un comme s’il s’agissait d’une formalité.
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Dans son livre, L’enfer d’Inal, l’un des rescapés, Mahamadou Sy, décrit un caporal, qui « prend le temps de siroter un verre de thé assis sur un cadavre, en attendant de pendre le suivant. Ceux qui tardent à mourir sont frappés d’une barre de fer. La pendaison dure une heure.

Quelques minutes après, les corps sont enterrées sur un terrain derrière la base d’Inal. Les rescapés sont libérés quelques mois plus tard ». Mahamadou Sy raconte qu’on lui a demandé d’oublier ce qui s’est passé, et de mettre cela sur le compte de la fatalité. Certains militaires sont radiés, les autres mis à la retraite.

En novembre 1990, 250 prisonniers seront conduits à Inal, mais seuls 96 auront la chance d’en repartir. Au total, des centaines de militaires mauritaniens noirs seront tués entre 1989 et 1991 dans le pays. Les tortionnaires sont eux protégés par la loi d’amnistie adoptée deux ans plus tard, en 1993.

Le refus de mémoire, donc le refus de cautériser une plaie, parmi d’autres qui tâchent le contrat social entre concitoyens pose la redoutable et lancinante question de la cohabitation, qui n’est qu’une question, au final, politisée par une minorité d’un système.
Mais c’était révélateur d’un malaise social : comment admettre, honnêtement, justement, sans aucun parti pris, que l’horreur a déferlé sur les consciences lors de cet événement. La déshumanisation d’un groupe ethnique, social ou culturel, sur la base d’une «infériorité» supposée, pour mieux la liquider fut la règle.
Une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte, barbare et anti progressiste.

Cet événement doit être rappelé à tous les mauritaniens, pour leur montrer que malgré cette horreur, les choses peuvent être dépassées mais pas, jamais, sans justice. Est il besoin de rappeler à la conscience individuelle et collective que sans un devoir de mémoire, de justice et de vérité aucune forme de réconciliation n’est possible dans ce pays lourdement divisé par des faits que l‘histoire retient et qui attise la difficile cohabitation entre les différentes communautés.

Mataka