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Suspension du Mali de la Cedeao et soutien au CMT au Tchad: le « deux poids deux mesures » des chefs d’Etats africains

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Suspension du Mali de la Cedeao et soutien au CMT au Tchad: le « deux poids deux mesures » des chefs d’Etats africains

En Afrique, les coups d’Etat sont monnaie courante malgré une bonne imprégnation du processus démocratique dans la quasi-totalité des pays. Le Mali et le Tchad ont été « à l’honneur »- au déshonneur devrions-nous dire- en avril et mai 2021. Bien que tous deux aient connu l’accession au pouvoir de régimes illégitimes, parce qu’inconstitutionnels, les deux pays ont connu des fortunes diverses quant à la suite accordée à leurs destins.

Si le Tchad a échappé jusque-là à des sanctions,  le Mali vient encore de faire l’objet de sanctions de la Cedeao après la montée au créneau d’une partie de la communauté internationale dont le président Emmanuel Macron.

C’est à croire que les sanctions et désapprobations ne surviennent que suivant l’intérêt de ceux qui décident sur le plan international. Quand le fils a succédé au père au Tchad alors que  la Constitution s’était clairement exprimée sur la question successorale, peu ou personne ne s’est levé pour  condamner le coup de force.

Même l’Union africaine, l’instance qui a été plus ferme dans sa réaction, n’est pas allée plus loin qu’une recommandation de passer le pouvoir aux civils. Ni désapprobation ni sanction n’a été émise de façon claire et pourtant l’arrivée de Mahatma Déby au pouvoir s’est fait dans la violation totale de la Charte fondamentale du Tchad.

A l’échelle internationale, la communauté n’a pas déprécié non plus cet acte que beaucoup de pays et d’institutions ont fini par valider. Ce qui va à l’encontre des principes basiques de l’Etat de droit et de la démocratie.

A en croire la réaction de l’ONU, par l’entremise du porte-parole du Secrétaire général, Stéphane Dujarric,, cette récupération du pouvoir n’est pas grave en soi: « Ce qui nous importe le plus maintenant est d’aider à désamorcer les tensions et à préserver la paix dans le cadre de notre mandat de prévention des conflits ». L’Union Africaine, elle aussi, rame dans le sens contraire de son engagement inclus dans le Traité de Syrte 1999 et qui stipule que l’organisme n’admet plus en son sein un gouvernement issu d’un coup d’Etat.

En lieu et place de condamnation, l’organisme régional, par l’intermédiaire de son Conseil de sécurité, « exhorte les forces de défense et de sécurité tchadiennes et toutes les parties prenantes nationales à respecter le mandat et l’ordre constitutionnel, à s’engager rapidement dans un processus de restauration de l’ordre constitutionnel et de transfert du pouvoir politique aux autorités civiles, conformément aux dispositions pertinentes de la Constitution de la République du Tchad, et à créer les conditions propices à une transition rapide, pacifique, constitutionnelle et sans heurts« .

Une attitude conciliante et qui bénit plus le coup qu’elle ne le bannit malgré la montée au créneau de la société civile tchadienne dont les manifestations ont conduit à une vraie répression le 28 avril dernier.

Si le Conseil militaire de transition a pu dérouler son programme sans grande difficulté, il le doit en partie au fait que le président de la commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, est d’origine tchadienne. Ce dernier n’a pas lésiné sur les moyens pour désamorcer les sanctions encourues par le pays pour avoir eu  à sa tête une junte militaire contrairement aux directives de l’Union africaine.

Plus important, le Tchad a eu un soutien de taille, en la personne de son « parrain », Emmanuel Macron, lequel n’a pas hésité d’assister aux funérailles d’Idriss Déby. Et qui connait l’influence du président français sur ses homologues africains, trouvera logique la réaction molle voie complice de ces derniers envers les autorités du CMT.

La présence de Macron aux côtés du président du CMT et sa déclaration selon laquelle « la France ne laissera jamais remettre en cause la stabilité et l’intégrité du Tchad » constituent sans ambages une légitimation du régime militaire. Cette position pro-junte au Tchad est différente de celle qu’il a adoptée face au Mali avec la dénonciation d’un « coup d’État dans le coup d’État » et la menace de retrait de ses soldats dans ce pays si l’ordre institutionnel n’était pas rétabli.

Il faut le dire sans langue de bois, la posture du président français a influé sur la décision de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest de suspendre le Mali, lors du sommet extraordinaire tenu à Accra aujourd’hui.

L’instance régionale s’est montrée tout de même moins ferme dans ses résolutions. Une brèche est ouverte au Mali pour réintégrer l’institution si les exigences de nomination d’un Premier ministre, du respect du processus de la Transition qui doit finir dans 9 mois, entre autres souhaits, sont observées.

L’absence de pression pour le départ du colonel Assimi Goïta de la tête de l’Etat constitue un pain béni pour la junte militaire qui n’aura pas besoin de jouer les seconds rôles comme sous le président Bah Ndaw,, lors de la première partie de la Transition.

Ababacar Gaye

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